eh bien, j'en suis !

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Le 26/05/2016 à 08:52


Dans la France de la deuxième moitié du XIXème siècle, entre les révoltes ouvrières de 1848 et 1871, des groupes de femmes et d’hommes, bravant les interdictions édictées par Napoléon « le petit », avaient coutume de se réunir dans des cercles, des associations de toutes sortes. La raison d’être d’un cercle était de grouper les hommes par affinité, pour d’agréables loisirs communs. Une autre était la lecture collective des journaux, qui se faisait à haute voix, dans les réunions populaires où il y avait souvent des illettrés. Il se dessinait ainsi des organisations bien rudimentaires comparées à celles de notre temps. Mais ce processus de pénétration, entre un idéal politique nouveau et la pratique sociale de tradition se retrouvait partout, suscitant l’effroi des Préfets qui en exagéraient la perfection comme la portée. « C’’est l’œuvre du militant politique qui fait de son cercle une sorte de club de réflexion ; c’est l’œuvre de l’éditeur démocrate qui confie ses brochures à la valise d’un colporteur, ou ses chansons politiques à la roulotte du chanteur ambulant ; c’est l’œuvre des paysans eux-mêmes lorsque faute de réunions politiques licites, ils transforment les fêtes folkloriques en manifestations rouges. » (1) Les habitants des beaux quartiers, les bravaches galonnés et les argousins du pouvoir, plein de morgue et de crainte, disaient d’eux : « C’est la canaille ! » Le peuple, par la voix du romancier populaire Alexis BOUVIER, leur renvoyait en écho : « Eh bien ! J’en suis ! » Dans la vieille cité française Existe une race de fer, Dont l’âme comme une fournaise A de son feu bronzé la chair. Tous ses fils naissent sur la paille, Pour palais, ils n’ont qu’un taudis. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Ce n’est pas le pilier du bagne ; C’est l’honnête homme dont la main Par la plume ou le marteau gagne, En suant, son morceau de pain. C’est le père, enfin, qui travaille Les jours et quelquefois les nuits. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! C’est l’artiste, c’est le bohème Qui, sans souper, rime rêveur Un sonnet à celle qu’il aime, Trompant l’estomac par le cœur. C’est à crédit qu’il fait ripaille, Qu’il loge et qu’il a des habits. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! C’est l’homme à la face terreuse, Au corps maigre, à l’œil de hibou, Au bras de fer à main nerveuse Qui sortant d'on ne sait pas où, Toujours avec esprit vous raille, Se riant de votre mépris. C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! C’est l’enfant que la destinée Force à rejeter ses haillons, Quand sonne sa vingtième année, Pour entrer dans nos bataillons. Chair à canon de la bataille, Toujours il succombe sans cris… C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Ils fredonnaient la Marseillaise, Nos pères, les vieux vagabonds, Attaquant en quatre-vingt-treize Les bastilles dont les canons Défendaient la vieille muraille ! Que de trembleurs ont dit depuis : « C’est la canaille ! » Eh bien ! j’en suis ! Les uns travaillent par la plume, Le front dégarni de cheveux. Les autres martèlent l’enclume, Et se soûlent pour être heureux ; Car la misère, en sa tenaille, Fait saigner leurs flancs amaigris... C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Enfin, c’est une armée immense, Vêtue en haillons, en sabots. Mais qu’aujourd’hui la vieille France Les appelle sous ses drapeaux, On les verra dans la mitraille, Ils feront dire aux ennemis : C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Paroles : Alexis Bouvier Musique : Joseph Darcier

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